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BIOGRAPHIE
Une façon de regarder
J’ai grandi dans l’est de Toronto. Mon vélo à siège banane m’amenait vers les triages ferroviaires et les quais. Parmi les voies et les ports, j’étais attiré par ce qui était jeté : connaissements effacés, manifestes jaunis, enseignes rouillées, emballages déchirés.
À la maison, la fascination pour l’usé et l’oublié se poursuivait. Ma collection de timbres n’était pas faite de numéros immaculés, mais plutôt d’enveloppes et de cartes postales anciennes, adressées à des personnes et à des lieux inconnus.
Les albums de ma mère, remplis de vedettes de cinéma de sa jeunesse, ouvraient une autre porte sur des décennies révolues. Et du divan, la télévision ajoutait ses images : le panneau patiné du 4077e, la balle de baseball autographiée sur le bureau du sergent Wojciehowicz.
Ces fragments alimentaient un imaginaire sans fin. Je n’étais pas seulement captivé par ce que je tenais en main, mais aussi par ce que je ne voyais pas. Le contexte manquant. Les histoires invisibles. Comment Woj avait-il convaincu tous ces joueurs de signer cette balle?
Au fil de ma carrière de designer et de directeur de création, créer des récits de marques est devenu une seconde nature. Il ne s’agissait jamais seulement d’un logo parfait—mais de ce qu’il évoquait au-delà du design : ce qui était suggéré, ressenti, rappelé.
Aujourd’hui, cette même fascination pour les fragments et l’invisible nourrit mon art du collage. J’arrache ce qui cherche à persuader, la publicité, l’image de marque, le bruit visuel de la ville, et je le reconstruis en quelque chose de plus ambigu, de plus ouvert. Je demeure habité par ce qui est laissé derrière, par ce qui est à moitié dit, par ce qui appelle le spectateur à compléter le reste.
À bien des égards, rien n’a changé. Je continue de rassembler des morceaux, d’imaginer ce qui a pu précéder et ce qui pourrait encore surgir.
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